lundi 30 avril 2012

Mon chien Stupide - John Fante



Résumé :

D'origine italienne, Henry Molise vit en Californie, mais garde au fond de lui son rêve de partir vivre à Rome pour retrouver ses origines. Mais ce rêve est également symptomatique du mal-être qui l'habite. Auteur de scénarii minables, père de quatre ados-adultes indignes, relations instables avec sa femme, Henry se demande où est sa vraie place. Jusqu'à l'arrivée de Stupide, un énorme chien errant qui a élu domicile chez cette famille -pas si- atypique.
Ce nouveau venu va faire remonter à la surface les rancœurs, les vraies personnalités, et les vérités de chacun. Henry doit alors faire des choix entre ses rêves et sa famille, pour trouver la stabilité qui calmera ce joyeux bordel à l'américaine.


Mon avis :

J’avoue qu’après avoir lu les premières pages de ce roman, j’ai eu un doute. Je me suis demandée si j’allais poursuivre. En général, je n’aime pas trop les récits loufoques et burlesques. Sauf que Mon chien Stupide, c’est plus qu’un simple récit loufoque et burlesque.
Bon et puis je dois bien reconnaître que j’ai quand même bien rigolé.

Face à ce roman, deux parts de moi-même se sont affrontées. Mon côté prude, qui fait écho au personnage d’Harriet l’épouse d’Henry toujours très choquée du comportement obscène du chien mais aussi de l’indélicatesse de son mari, et mon côté laxiste, plus proche d’Henry. Henry approche la cinquantaine et il en a marre. Il en a marre de sa femme, qui n’a plus la fraîcheur et la beauté de sa jeunesse mais qui fait bien à manger il faut bien le dire, mais aussi de ses enfants qui n’en font qu’à leur tête et ne lui causent que des soucis.
L’arrivée de Stupide, un chien un peu pâteux et très obsédé, vient chambouler tout ce petit monde.

On alterne alors entre le burlesque et le dramatique. En parallèle des péripéties de Stupide et
 son maître, offrant au lecteur des scènes croustillantes assaisonnées de psychologie canine et de dialogues incisifs où les vannes fusent , on assiste au lavage de linge sale de la famille Molise.
Je n’ai pas su quoi penser d’Henry. Parfois je lui donnais raison, d’autres fois je trouvais qu’il allait trop loin, et souvent il m’a fait de la peine. Ses enfants, en revanche, m’ont exaspérée.

Plus qu’un récit déjanté au style cru et vivant, Mon chien Stupide est une chronique ordinaire d’une famille ordinaire confrontée à des problèmes ordinaires que toute famille traverse un jour : racisme, carrière ratée, démon de midi, départ des enfants etc…
John Fante a donc réussi à raconter ce qui pourrait être la vie de n’importe lequel d’entre nous mais en lui apportant une grosse touche d’humour qui lui donne ce côté léger mais très touchant.
C’était la lecture idéale avant d’aborder un poids lourd de la littérature.


jeudi 26 avril 2012

La ferme des animaux - George Orwell



4ème de couverture :

Un certain 21 juin eut lieu en Angleterre la révolte des animaux. Les cochons dirigent le nouveau régime. Boule de Neige et Napoléon, cochons en chef, affichent un règlement :
" Tout ce qui est sur deux jambes est un ennemi. Tout ce qui est sur quatre jambes ou possède des ailes est un ami. Aucun animal ne portera de vêtements. Aucun animal ne dormira dans un lit. Aucun animal ne boira d'alcool. Aucun animal ne tuera un autre animal. Tous les animaux sont égaux. "
Le temps passe. La pluie efface les commandements. L'âne, un cynique, arrive encore à déchiffrer : " Tous les animaux sont égaux, mais (il semble que cela ait été rajouté) il y en a qui le sont plus que d'autres. "

Mon avis :

George Orwell m’a bluffée encore une fois. Réussir à raconter une partie de l’histoire de la Russie soviétique de façon aussi ludique est une magnifique prouesse et je ne peux être qu’admirative.
La ferme des animaux est en effet une satire et une critique du stalinisme. On y retrouve les principaux événements et les principaux protagonistes de cette sombre période de l’Histoire russe. Il s’agit en fait d’un apologue à l’image des fables de La Fontaine. Le texte est à vocation éducative et utilise des images simples (ici une ferme avec des animaux) pour véhiculer un message ou une morale.
Je ne vais pas m’attarder à en faire l’étude détaillée, l’article Wikipédia l’a déjà très bien fait et je ne trouve pas utile de répéter le tout ici.
En tout cas, je pense sérieusement à encourager mes élèves de 3ème à lire ce roman qui est très court et qui leur permettra certainement de mieux comprendre ce chapitre de leur programme.
J’aurais aimé qu’on me fasse découvrir ce livre plus tôt moi aussi.
J’ai cru comprendre, grâce à l’article Wikipédia , que La ferme des animaux avait été censurée en Angleterre.
Orwell a justement dénoncé cette censure dans une préface qui a été … censurée elle aussi et qu’on ne trouve pas dans toutes les éditions. (elle était absente de la mienne d’ailleurs …)
Toutefois, je vous mets le lien de cette préface ici car elle se révèle fort instructive.
En effet, lorsqu’Orwell eut terminé d’écrire La ferme des animaux, la seconde guerre mondiale n’était pas encore finie. Les Alliés tenaient à rester en bons termes avec la Russie pour faire front commun face aux allemands. Tout écrit jugé « offensant » à l’encontre du régime stalinien était évidemment considéré comme mal venu.
J’invite fortement à la lecture de ce roman et de la préface qui devrait l’accompagner.



dimanche 22 avril 2012

Noir Négoce - Olivier Merle



4ème de couverture :

Bercé par les récits des voyages de Bougainville, Jean-Baptiste Clertant vit à dix-huit ans un rêve éveillé : diplômé de la prestigieuse Ecole d’hydrographie du Havre, il s’apprête à embarquer pour la Guadeloupe comme second lieutenant à bord de l’Orion.
La traversée, qu’il espère formatrice et riche d’expériences, va faire grandir le jeune homme au-delà de tout ce qu’il pouvait imaginer. Car le deux-mâts qui l’accueille est un navire négrier. Et obéir aux ordres devient vite un cauchemar lorsqu’il faut côtoyer l’horreur.

Mon avis :

Il y a des romans qui vous marquent à vie par leur sujet, leur style et les émotions qu’ils vous procurent. Noir négoce est de ceux-là et je ressors de ma lecture totalement bouleversée.
Le sujet est dur, épineux et prête à polémique : la traite négrière.
A travers les yeux de Jean-Baptiste, Olivier Merle vous fait vivre le quotidien à bord d’un navire négrier, de son départ de France jusqu’en Afrique où il se procure sa « cargaison » puis vers la Guadeloupe, lieu de vente des esclaves contre des marchandises diverses avant le retour en France.

En embarquant à bord de l’Orion, le jeune homme ignore totalement la nature réelle du commerce auquel il va participer contre son gré mais contre lequel il va aussi se révolter. Peu à peu, le voile se lève et Jean-Baptiste prend conscience de l’infamie qui se déroule sous ses yeux. Parmi l’équipage, il trouvera des alliés mais aussi de fervents défenseurs du système esclavagiste. Olivier Merle résume dans la bouche de ses personnages les principaux arguments utilisés par les défenseurs de la traite et de l’esclavage de l’époque mais exprime aussi le point de vue de ses opposants. Cette bataille d’arguments ne peut laisser le lecteur de marbre et l’amène fortement à réfléchir sur le sujet. La solide documentation sur laquelle s’est appuyé Olivier Merle pour l’écriture de son roman le rend extrêmement riche d’enseignements. Tout est détaillé et rien n’est oublié : le contexte géopolitique de l’époque avec la concurrence à laquelle se livraient les pays européens pour le marché des esclaves, les descriptions de la présence coloniale sur place qui, en fait, ne tenait qu’à de petits forts incapables de se défendre et qui passaient de main en main, les modalités des tractations commerciales et des négociations entre le capitaine négrier et les représentants locaux, bien entendu les détails liés au transport des esclaves à bord du navire, les détails de leur vente, et enfin l’analyse de la société guadeloupéenne de l’époque, le tout appuyé des extraits des réglementations en vigueur à l’époque ( Code Noir etc…).

Ecrit à la première personne du singulier, ce roman implique son lecteur et le prend à témoin. Et non seulement l’auteur a travaillé le côté historique de son intrigue avec une grande rigueur mais il régale également son lecteur par ses talents de conteur et sa plume magistrale de laquelle sort un texte écrit dans une langue fine et posée qui représente bien l’époque sans assommer le lecteur de termes de vieux français et de tournures de phrases alambiquées.
Les personnages sont attachants, je pense principalement à Bonicart, le canonnier plein d’humanité et philosophe qui m’a beaucoup touchée, mais aussi à Mbagnik, l’esclave affranchi dont Jean-Baptiste parviendra à capter l’amitié. J’ai eu en horreur le lieutenant Criquot esclavagiste convaincu, foncièrement mauvais et cruel. Et je laisse les autres personnages à votre découverte.

Bien sûr, le roman ne s’arrête pas à ce que je viens d’exposer, il y a une intrigue dont je ne dévoilerai rien si ce n’est qu’elle m’aura fait verser de chaudes larmes. Je ne dirai pas si ces larmes étaient de joie ou de tristesse. Et si je fais ma mystérieuse, ce n’est pas pour rien mais pour vous encourager à lire ce roman magnifique dont je m’étonne de ne pas trouver plus souvent la trace sur la blogosphère.
Un grand merci et toute mon admiration à Olivier Merle pour son grand talent et ce bonheur de lecture qui, à défaut du navire, aura fait chavirer mon cœur de lectrice.

Note :
A la suite de ce roman, j’ai voulu aller plus loin dans le sujet et j’ai entamé la lecture de l’ouvrage d’Olivier Pétré-Grenouilleau Les traites négrières, ouvrage qui a fait couler beaucoup d’encre par certaines de ses affirmations qui prêtent à polémique. En dehors des dites affirmations « litigieuses », je retrouve dans cet essai nombre d’informations techniques données dans le roman d’Olivier Merle qui a sans doute du l’utiliser lors de ses recherches. J’ai tenu à souligner ce fait pour montrer à quel point le roman d’Olivier Merle est d’une grande justesse historique et qu’on peut s’y plonger sans la crainte d’y trouver des contre-vérités (ce qui est ma hantise lorsque je lis un roman historique).
Il est vrai qu’Olivier Merle donne, en fin d’ouvrage, la liste des auteurs qu’il a abordés durant ses recherches. Néanmoins j’aurais apprécié qu’il précise également les titres des ouvrages qu’il a consultés, je sais que la liste est longue mais au moins les plus importants m’auraient été utiles.



vendredi 20 avril 2012

La Trilogie Fondation - Isaac Asimov



4ème de couverture :

En ce début de treizième millénaire, l'Empire n'a jamais été aussi puissant, aussi étendu à travers toute la galaxie. C'est dans sa capitale, Trantor, que l'éminent savant Hari Seldon invente la psychohistoire, une science nouvelle permettant de prédire l'avenir. Grâce à elle, Seldon prévoit l'effondrement de l'Empire d'ici trois siècles, suivi d'une ère de ténèbres de trente mille ans. Réduire cette période à mille ans est peut-être possible, à condition de mener à terme son projet : la Fondation, chargée de rassembler toutes les connaissances humaines. Une entreprise visionnaire qui rencontre de nombreux et puissants détracteurs...

Mon avis :

J’avais lancé une LC pour le premier volet de cette trilogie Fondation et finalement, tellement emballée , j’ai lu les volets suivants à la suite. Cette chronique regroupe donc mes impressions sur chacun des 3 tomes de la trilogie Fondation qui pour moi est un chef d’œuvre !

Tome 1 Fondation :
J’ai d’abord été déçue par le manque de descriptions. C’est vrai qu’avec le genre SF on s’attend à des paysages et des descriptions étonnantes. Ici, à part la description de la planète Trantor, capitale de l’Empire, on reste un peu sur sa faim. Pas de grand spectacle !
En fait, ce tome concentre essentiellement dialogues et thème politique, ce qui a pu paraître ennuyeux pour certains, je peux le comprendre. Pour ma part, j’ai adoré quand même. Tout est bien ficelé, cohérent et logique. J’ai quand même préféré la première moitié jusqu’aux marchands . J’ai eu comme une impression de parallèle entre l’histoire imaginée par Asimov et la nôtre. Le règne de la religion puis du commerce, le système des pacotilles vendues contre l’accès aux ressources n’a pas été sans me rappeler le commerce avec les colonies où les colons vendaient des pacotilles pour acheter le bon vouloir des rois locaux en Afrique.
Bien que ce soit assez politique dans l’ensemble, le récit est très facile à suivre et à comprendre. Le style d’Asimov aide beaucoup, simple, fluide, ça se lit tout seul.
En fait, le tome se présente comme une suite de nouvelles distinctes avec des personnages différents mais avec une trame de fond commune. Seules les crises Seldon sont racontées, du coup c’est un peu le même schéma qui revient et ça devient répétitif à la longue. C’est une des raisons pour lesquelles j’ai été plus emballée par la première moitié ( l’attrait de la nouveauté) que par la deuxième (sensation d’essoufflement et de répétition).
Sur l’histoire en elle-même, je dirais que c’est extrêmement bien trouvé, on se retrouve plongé dedans et on a envie de savoir ce qui va se passer. Voilà pourquoi je n’ai pas pu résister et attendre pour lire les tomes suivants. Je me demandais d’ailleurs ce que donnerait le tome 2 et où Asimov emmènerait le lecteur.




Tome 2 Fondation et Empire :
Un tome 2 époustouflant qui ne fait pas du tout regretter d’avoir poursuivi sa lecture. Ici on y trouve enfin plus de descriptions et surtout plus d’action.
Finalement, le tome 1 était un peu une introduction où Asimov plantait le décor. Ici, ça y est ça démarre et surtout avec l’apparition du personnage Le Mulet, personnage intrigant et mystérieux. On se pose beaucoup de questions à son sujet même si finalement le tout est un peu prévisible.
Et autre rebondissement : une des apparitions de Seldon se trompe ! Les prévisions de Seldon sont tombées à côté, de quoi relancer le suspense. On se demande vraiment ce qui se passe et comment la Fondation va s’en sortir. Cet événement constitue une vraie rupture avec le côté répétitif du tome 1, l’intérêt du lecteur monte en flèche, on ne lâche plus le livre. Le style est toujours aussi agréable.
Bref un tome 2 bien plus accrocheur que le premier et au bout duquel on se jette sur le tome 3.




Tome 3 Seconde Fondation:
Eh oui ! Seldon avait bien parlé d’une seconde Fondation, mais où donc se trouve-t-elle ? Dans ce troisième tome encore, le suspense est au rendez-vous. On suit les aventures d’Arcadia qui part à la recherche de la Seconde Fondation. Je ne peux pas entrer dans les détails de l’histoire, je sais que ce n’est pas très parlant ce que j’écris mais si je commence à expliquer ça gâchera tout le plaisir de ceux qui voudraient se plonger dans cette passionnante aventure.
Juste quelques mots pour dire que dans ce tome 3, on a quelques descriptions scientifiques et techniques assez ardues mais qu’il faut s’accrocher car de nombreuses surprises attendent le lecteur dans ce tome. Asimov m’a bien bluffée, toute la trilogie est cohérente, logique, sans aucune faille. Je n’ai remarqué aucune anomalie, aucune fausse note. Asimov a construit toute une civilisation avec ses codes, ses lois, c’est absolument fascinant !
Cette trilogie est juste parfaite !
Un régal de lecture, un grand classique de la SF à ne pas manquer !
J’attends un peu avant de me plonger dans la suite ( car oui c’est pas fini, il reste encore 2 tomes !), il me faut avant de poursuivre ce cycle Fondation lire le cycle des Robots. Les deux sont liés et on savoure bien plus Fondation en ayant déjà lu Les Robots. Alors voilà, y a plus qu’à !


jeudi 19 avril 2012

Le Roman des aventuriers - François Cérésa



4ème de couverture :

L'aventure est un mot aux mille facettes.
Où commence-t-elle, où finit-elle? Un homme d'aventures est un aventurier, une femme d'aventures une femme galante. Mais on peut aller à l'aventure, tenter l'aventure, avoir le mal d'aventures, dire la bonne aventure, se retrouver d'aventure... D'Ulysse à Errol Flynn, d'Athos à Pierre Loutrel, de Tintin à Joseph Kessel, sans oublier Mary Read, Anne Bonny et Karen Blixen, ce Roman des aventuriers dresse le portrait piquant de ces héros d'hier et d'aujourd'hui qui ont décliné le mot "aventure" à toutes les sauces, à toutes les époques, sur toutes les mers et tous les continents.

Mon avis :

Lorsque j’ai vu ce livre dans les partenariats proposés par Livraddict, je me suis ruée dessus. Les grands aventuriers m’ont toujours fascinée et je souhaitais en apprendre plus. Et puis, l’idée d’évoquer aussi des aventuriers fictifs était amusante également. J’ai donc ouvert ce roman avec grand enthousiasme.

Mais dès les premières pages, j’ai senti la catastrophe arriver. Je m’attendais en fait à une sorte d’essai avec des biographies solides des personnages présentés, bref quelque chose d’assez scolaire à vrai dire. Les innombrables références cinématographiques ( qui ne m’évoquent rien pour la plupart) ainsi que le style lourd aux jeux de mots sans fin m’ont fait reposer le livre au bout du premier chapitre.
Je pensais en rester là et puis, conscience de blogueuse oblige, je l’ai tout de même repris non sans appréhension.

Et finalement j’ai poursuivi ma lecture avec plaisir.

Dans les chapitres où les références cinématographiques sont moins nombreuses, je me suis régalée.
J’ai appris beaucoup de choses notamment sur les deux femmes pirates Mary Read et Anne Bonny que je ne connaissais que de nom, sur les grandes figures de l’Ouest américain même si, tout comme une camarade blogueuse, je déplore l’absence des grandes figures indiennes. J’ai beaucoup aimé aussi le chapitre sur Le Caravage un de mes peintres préférés, bien entendu je n’ai rien appris cette fois car je connaissais déjà bien le personnage mais la façon de raconter de l’auteur m’a beaucoup amusée. J’ai découvert également le personnage de Fournier dont j’ignorais totalement l’existence ! Moi qui ne porte pas Napoléon dans mon cœur, je dois dire que ce personnage m’a particulièrement plu. Ce que j’ai moins aimé dans le traitement du chapitre qui lui est consacré, c’est que l’auteur entre trop dans les détails, trop de noms de personnes, trop d’insistance dans le récit des batailles. Bref, pour savourer pleinement cette partie, il faudrait, je pense, maîtriser la période napoléonienne à la perfection, ce qui n’est pas mon cas.
Grâce à monsieur Cérésa, j’ai aussi fait connaissance avec Nellie Bly qui m’a totalement fascinée ! J’ignorais totalement l’impact qu’avait pu avoir le roman de Jules Verne Le tour du monde en 80 jours et qu’on avait cherché à battre le record de Phileas Fogg. Et ce record c’est Nellie qui l’a battu et à 25 ans ! Chapeau Madame ! Et même admiration pour Gertrude Bell et bien d’autres encore.
J’ai beaucoup apprécié la large place faite par l’auteur aux aventurières trop souvent oubliées au profit de ces messieurs. La palette d’aventuriers choisis par l’auteur pour cet ouvrage n’est certes pas exhaustive mais très variée et enrichissante. Loin des aventuriers auxquels on s’attend habituellement ( les Christophe Colomb, Marco Polo etc…), on y trouve des acteurs, des journalistes, des personnages de films et de romans et aussi des écrivains au point que ce livre m’a donné envie d’en lire beaucoup d’autres !

Encore une fois, la seule chose que je reproche à cet ouvrage, c’est l’omniprésence du cinéma. Je n’y connais rien en ce domaine et ça m’a un peu gâché mon plaisir par moments.
En tout cas, j’ai énormément appris grâce à cet ouvrage. Finalement, une présentation scolaire m’aurait certainement ennuyée. Le choix de l’humour et d’un parler sans langue de bois était risqué mais s’est avéré payant pour moi. La lecture était ainsi plus fluide comme si on me racontait l’histoire à l’oral.
Brosser le portrait d’un aventurier en 3-4 pages ne doit pas être chose aisée mais Monsieur Cérésa s’en est tiré avec brio.
C’était donc un ouvrage exigeant par son style et son érudition mais qui m’a fait voyager dans le temps et dans l’espace. Je suis revenue de mon voyage enthousiasmée malgré les difficultés du départ.
Et plus qu’une galerie de portraits, c’est aussi un livre qui invite à réfléchir et à se demander pourquoi l’aventure attire tant. Qu’y recherche-t-on finalement ?

En guise de réponse, j’ai retenu cette citation que je trouve très belle et très juste :

« La véritable aventure est un match perdu d’avance contre la misère et la solitude. »

Je remercie infiniment Livraddict, les éditions du Rocher et Monsieur Cérésa pour cette bien belle aventure qui se sera achevée trop vite à mon goût.

Journal 1955-1962 - Mouloud Feraoun



Cinquantenaire de l’indépendance de l’Algérie oblige, je me suis replongée dans cette période douloureuse de notre Histoire.
Nombre de magazines ont consacré un numéro spécial ou un hors-série à la guerre d’indépendance pour l’occasion et j’ai particulièrement apprécié la démarche du magazine L’Histoire qui a été plus loin encore en proposant de retracer toute l’histoire de l’Algérie, des Berbères à l’indépendance. Je conseille d’ailleurs vivement ce numéro.

Après m’être donc rafraîchie la mémoire grâce à ces revues, j’ai entamé la lecture d’un ouvrage très bien fait lui aussi : Histoire de la guerre d’indépendance algérienne de Sylvie Thénault. Un ouvrage fort utile car non seulement il retrace les principaux événements mais il fait aussi le point sur la recherche et l’historiographie relatives à ce sujet épineux. En effet, à chaque fois que je lis quelque chose sur la guerre d’Algérie, je me pose sans cesse la question de savoir si c’est réellement objectif. A l’heure actuelle, on peut penser que oui mais il y a peu de temps encore, les soldats français n’avaient qu’entendu parler de la torture mais ne l’avaient jamais vue. Comprendre : la torture n’avait été qu’un fait occasionnel, un dérapage. Or, la recherche a depuis montré que la torture avait fait partie du quotidien des combattants d’Algérie.
Afin de pouvoir me faire une opinion sans avoir à subir la vision franco-française, je me suis tournée vers un algérien, un écrivain algérien de grand talent dont j’ai déjà lu un des titres (chroniqué ici), Mouloud Feraoun.
Mouloud Feraoun a écrit un journal dans lequel il relate ce qu’il voit, ce qu’il lit, ce qu’il entend pendant cette période de guerre.
Avoir le point de vue d’un témoin des événements et voir comment il les a vécus et interprétés, voilà ce que j’attendais de ce journal.

Mouloud Feraoun était instituteur, il faisait partie de ces algériens qui ont eu la chance d’occuper un poste « à égalité » avec les colonisateurs. Dans ce journal, il raconte donc son quotidien d’enseignant dans une petite école de Kabylie puis à Alger jusqu’à son assassinat par un commando de l’OAS deux jours avant le cessez-le-feu du 17 mars 1962.
A travers son journal, on découvre un homme sans aucune haine à l’encontre des français mais comme tout algérien, il est évidemment pour l’indépendance de son pays et contre cette domination injuste qu’ont exercée les français depuis leur arrivée sur le sol algérien. Bien qu’ayant eu lui-même une position privilégiée en tant qu’instituteur, tous ses compatriotes étaient loin d’être logés à la même enseigne.

Et c’est un homme un peu tiraillé entre deux camps qui se déchirent qui se livre à nous. A travers sa plume, on assiste au quotidien des habitants de Fort-National, aux après-midis aux rues désertes, aux portes de la ville fermées, aux fouilles, aux soldats qui tirent sur ceux qui s’enfuient, aux gens qui se cachent le cœur battant derrière leurs volets clos.
Dans les petits villages de Kabylie, on craint leur arrivée. Français ou combattants du FLN, on les craint tous. Ce que les uns laissent, les autres le prennent. Du côté FLN, la loyauté se paye en nourrissant et en hébergeant les partisans. Au risque de représailles. Quand la nuit tombe, on retient son souffle, on ne dort pas, on a peur d’entendre frapper à la porte. Et si on se fait attraper, on parle, on avoue tout, des actes dont on a même pas entendu parler, on avoue.
Au matin, lorsqu’on sort de chez soi, on peut tomber sur un ou plusieurs cadavres. En général, on les connaît. On se demande « à quand mon tour ? ».

Le FLN ordonne à tous ceux qui travaillent avec les français de ne plus se présenter à leur poste. Que faire ? Qui craindre le plus ? Finalement, on se range du côté des siens.
« Oui, je me battrai parce que j’ai vécu dans ce pays que je crois être le mien. »
Ce qu’on pense du FLN ?
« Tout le monde comprend que « les frères » ne sont pas infaillibles, ne sont pas courageux, ne sont pas des héros. Mais on sait aussi qu’ils sont cruels et hypocrites. Ils ne peuvent donner que la mort mais, eux, il faut tout leur donner. Ils continuent de rançonner, de réquisitionner, de détruire. Ils continuent de parler religion, d’interdire tout ce qu’ils ont pris l’habitude d’interdire et ce qu’il leur chante de nouveau d’interdire. Il faut les appeler « frères » et les vénérer comme des dieux.[…]
Il arrive parfois qu’un pauvre bougre, dont les nerfs lâchent subitement, soit atteint d’une espèce de folie lucide et se mette à parler, parler, parler. A la djema, au café, partout, il dit ce qu’il pense de ses « frères ». Et les gens le regardent effarés et apitoyés, car ils savent qu’il n’y a plus rien à faire pour qu’il se taise. Et dans un sens, ils ont plaisir à l’écouter puisque, ce qu’il dit, il le lit dans leur cœur. »

En lisant le journal de Mouloud Feraoun, c’est un témoignage plein d’humanité servi par une plume magnifique que l’on lit et grâce auquel on comprend que les algériens ne cherchaient que deux choses : avoir les mêmes droits que tout le monde et vivre en paix.
J'espère, avec cette chronique, avoir su rendre hommage, même modestement,  à cet écrivain de talent et cet homme que j'admire énormément.
Un document et un auteur à découvrir absolument.


lundi 16 avril 2012

Poétique de l'égorgeur - Philippe Ségur



4ème de couverture :

Universitaire à la vie bien tranquille, Nid Immarskjöld Dugay dissimule en réalité un esprit tourmenté. L’univers entier l’inquiète, ses semblables le terrifient. Tous les soirs, parce qu’elles le lui demandent, il raconte à ses filles une aventure à épisodes, un récit sombre et cruel dans lequel il traduit ses angoisses secrètes : Yagudin, un criminel maléfique, y épouvante les foules en ravissant les épouses et en éliminant les enfants.
Un jour, pourtant, Nid va être débordé par le produit de son imagination : Yagudin, l’homme aux mains percées, apparaît dans sa vie et entreprend de la saborder. Condamné à découvrir qui se cache derrière la figure flamboyante et énigmatique de l’homme qui a détruit sa famille, Nid se lance à sa poursuite. Menée tambour battant, sa course éperdue devient l’épopée d’un homme confronté à ses peurs dans un univers menaçant et hostile.
Suspense, humour, beauté du style et puissance de l’imaginaire…, le lecteur impatient dévorera ces pages et découvrira qui se dissimule derrière l’horrible Yagudin.

Mon avis :

J’avais été totalement conquise par Le rêve de l’homme lucide et j’avais décidé de découvrir les précédents romans de Philippe Ségur. Et c’est avec curiosité que j’ai lu Poétique de l’égorgeur 3ème roman de l’auteur.
Mon avis est mitigé. Mitigé car d’un côté j’ai apprécié ma lecture mais d’un autre côté j’ai vraiment eu l’impression d’avoir lu deux fois le même bouquin. Pas de chance ! La recette est strictement la même que dans Le rêve de l’homme lucide, il y a même beaucoup trop de similitudes entre les deux récits. Les personnages sont identiques, seul leur nom change mais leur portrait reste le même. On retrouve également le procédé de l’histoire dans l’histoire, on retrouve aussi cette perte d’identité du personnage principal.
En clair, c’est comme si on avait deux chansons avec la même musique mais avec des paroles différentes. Oui parce que, quand même, l’issue de l’histoire n’est pas la même dans les deux cas . Ouf !
Donc voilà, je suis déçue par ce roman mais je n’oublie pas qu’il a été écrit avant Le rêve de l’homme lucide. Ce serait donc plutôt ce dernier qui manque d’originalité et qui ne serait qu’une « reprise » de Poétique de l’égorgeur. Mais une reprise plus aboutie je dirais. Avec un humour mieux dosé, une issue plus surprenante et originale. Même si je crois fortement que les personnes ayant déjà lu Poétique de l’égorgeur seront déçus par le petit dernier.
En revanche, si vous n’avez jamais lu Philippe Ségur, vous serez probablement conquis par ce récit. Mais si je peux me permettre ce conseil, à choisir entre les deux, choisissez plutôt le petit dernier.
Alors je ne sais pas ce que donnent les autres romans de Philippe Ségur. J’essaierai pour voir s’ils sont différents mais ce ne sera probablement pas pour tout de suite.


mercredi 4 avril 2012

Le voyage d'Anna Blume - Paul Auster

Me revoilà après un mois d'absence et plein de chroniques en retard. Je vais essayer de les poster au fur et à mesure sachant qu'en ce moment je n'ai pas trop la tête à la lecture ni à l'écriture de chroniques mais je vais tacher de faire de mon mieux.
Je commence par ce roman de Paul Auster, assez court et rapide à lire : Le voyage d'Anna Blume. Ma chronique n'est pas très développée, je ne l'avais écrite qu'en partie et à présent mes souvenirs sont trop flous pour la détailler davantage. Mille excuses à mes lecteurs. J'espère que ce passage à vide ne durera pas trop longtemps.
En tout cas, c'est bon de vous retrouver !



4ème de couverture :

Une ville au bout du monde, cernée de murs, livrée à la désagrégation, dont les habitants tâchent de subsister en fouillant dans les détritus. De ce « pays des choses dernières », comme l’appelle le titre original du roman, la jeune Anna Blume écrit à un ami d’enfance. Venue à la recherche de son frère disparu, elle raconte ses errances dans les rues éventrées, sa lutte contre le froid, les prédations, le désespoir.
Le romancier de L’invention de la solitude et de la Trilogie new-yorkaise nous entraîne ici dans un de ces univers, à mi-chemin du réel et du symbolique, dont il a le secret. Sur les pas d’Anna Blume et de quelques autres, résolus comme elle à ne pas s’anéantir dans l’abjection et la violence, nous traversons une fin du monde qui ressemble par bien des traits à notre monde. Avec eux, aux dernières pages du livre, nous serons conviés à rêver d’un autre départ, vers d’autres contrées …

Mon avis :

Une 4ème de couverture alléchante, des critiques élogieuses, je m’attendais donc à passer un très bon moment comme j’en avais déjà eu l’occasion à chacune de mes lectures de Paul Auster. Mais malheureusement, cette fois-ci j’ai été un peu déçue.
Je ne critique pas du tout la qualité du récit. Comme toujours, c’est remarquablement bien écrit. La narration sous forme de lettre donne l’impression qu’Anna s’adresse directement au lecteur, bien que cette lettre soit destinée à son ami d’enfance. On se sent donc vite happé par l’univers d’Anna, un univers froid, violent, une plongée en plein cauchemar dont on attend désespérément la fin. Mais de cette fin, on ne saura rien.
Tout ce qui nous est donné de savoir est qu’Anna est issue d’un milieu assez aisé et qu’elle part à bord d’un navire à destination de la ville à la recherche de son frère qui y a été envoyé en tant que reporter et dont sa famille est sans nouvelles. La ville en question est plongée dans le chaos le plus total. Toutes les communications avec l’extérieur sont coupées, les bâtiments et les rues sont détruits, la misère règne partout, le froid, la faim et le désespoir poussent de nombreuses personnes à rechercher le salut dans la mort. La mort devient même un commerce. Paul Auster nous fait une incroyable description d’un monde dystopique, incroyable notamment par son réalisme et sa proximité d’avec le monde que nous connaissons, ce qui rend le récit encore plus plausible.  Le décor est construit de façon très précise. En revanche, on ne sait absolument pas comment ni pourquoi la situation en est arrivée là. Aucun nom de lieu n’est cité. Le lecteur a vraiment l’impression d’être dans une autre dimension, une sorte de monde parallèle.
Le thème dominant de ce récit reste un thème cher à Auster puisqu’il s’agit à nouveau du thème de la disparition et de l’oubli. Le monde tel qu’il était avant s’efface peu à peu tant matériellement que dans les mémoires.
Un récit qui régalera les fans de dystopie et de mondes apocalyptiques ; moi, je n’y ai pas retrouvé ce que j’aime chez Auster bien que je reconnaisse que ce roman soit vraiment bon. J’aurais souhaité plus de surprise. En tout cas, le voyage vaut tout de même la peine.